On s’habitue à tout, il paraît – version 2 : la vie quotidienne

Il y a maintenant 10 mois que nous sommes sur la route. Au début, on ne comprenait pas tout ce qui se passait autour de nous. Dès que nous avons passé la frontière du Mexique, il était évident que nous étions dans un autre monde.

Tout à coup, il fallait rouler à cheval entre la route et l’accotement pour permettre aux autres voitures et aux camions de nous dépasser – la ligne blanche séparant les deux voies n’ayant aucune signification particulière. Tout le monde double tout le monde, surtout les autobus et les camions et n’importe où : virage, montée, descente, ligne droite. Tout un choc pour nous Canadiens qui respectons les lois à la lettre ! Il paraît que l’on se fait à tout de toute façon. Eh bien oui ! On s’y est fait et maintenant on fait pareil, sauf dans les virages !

Il y a aussi les topes ou tumulos suivant le pays ! Il y en a partout sauf peut-être au Nicaragua où ils sont plus rares. Un tope est ce que nous appelons un dos d’âne. Il peut être plus ou moins haut – souvent plus que moins – et il se trouve n’importe où : dans une montée, une descente, un virage, une ligne droite, à l’entrée d’un village, etc. Il est fait d’asphalte aussi bien que de terre. Le tope vient en série de 2, minimum. Le premier est souvent indiqué et il nous incombe de découvrir les autres. Il paraît que l’on se fait à tout, eh bien non ! On ne se fait pas aux topes et la Sopol s’en est pris quelques-uns à 50 km/h. Croyez-moi, à cette vitesse, tout saute dans le camion quand les roues franchissent cette protubérance asphaltée ! Même à 10 km/h, ça fait mal de passer sur un tope, surtout quand il est très haut et que l’arrière du véhicule vient cogner le monticule !

Un autre élément routier retient souvent notre attention : le trou dans la route ou nid de poule en québécois. La palme des trous revient au Honduras. Le Guatemala se place en second. Le trou se trouve n’importe où et il peut parfois accompagner un tope : trou-tope-trou, tope-trou, trou-tope. Certaines routes en ont quelques-uns décimés au hasard, juste pour s’assurer que le conducteur reste vigilant dans sa conduite. D’autres routes ne sont composées que de trous et il faut slalomer entre chacun à 15 km/h, ce qui est parfois impossible parce qu’il n’y a que des trous. Son périmètre et sa profondeur varient aussi. Allant du petit bobo routier au cratère, comme celui que s’est pris la Sopol à Puerto Escondido au Mexique. Ce coquin se cachait juste après le feu rouge : la Sopol démarre en trombe pour pouvoir passer devant le taxi qui est à sa gauche et hop ! Trou ! La Sopol n’a pas dépassé le taxi et les batteries des panneaux solaires se sont couchées – c’est quand même 25 kg à bouger ! Alors non, on ne se fait pas à tout et surtout pas aux trous !

Parfois, nous cherchons un lieu, un magasin. Nous demandons alors aux gens de nous indiquer où nous pouvons trouver l’objet de notre recherche. Il y a toujours quelqu’un pour nous aider et nous orienter. Par contre, on trouve rarement ce que nous cherchons ! Les gens ne disent jamais qu’ils ne savent pas et préfèrent nous envoyer quelque part que de ne rien dire. Au Costa Rica, nous cherchions du gaz propane pour remplir notre bouteille. Nous sommes allés à une première installation que nous avions sur une carte : rien. Nous avons demandé à une personne qui vivait à côté. Effectivement, il y avait du gaz ici, avant. Maintenant, il faut aller à un autre endroit qu’elle nous indique. On y va : rien. On demande encore à une autre personne qui nous assure que l’usine de gaz est à quelques kilomètres. On y va : rien. On demande une troisième fois. On y va : rien ! Nous avons parcouru 25 km à la recherche de gaz sans succès. Il paraît que l’on se fait à tout et ici c’est vrai : si on ne trouve pas après la deuxième indication, on abandonne !

Au Mexique et en Amérique Centrale, on dit toujours bonjour : quand on croise quelqu’un, quand on entre dans un magasin, tout le temps. Mais attention, ce n’est pas aussi facile que ça de dire bonjour ! Le matin, on dit « buenas dias », à partir de midi : « buenas tardes » et quand la nuit tombe : « buenas noche ». Souvent, on commence par dire « Hola » puis « buenas quelque chose » suivant le moment de la journée. Là encore, il y a des différences suivant les pays : « holà buenas », « holà buenas dias », « buenas ». On a déjà du mal à se souvenir du bon « buenas » à utiliser mais en plus se souvenir du bon enchainement de mots, aïe ! On ne s’y fait pas !

Comedor sur la route à Santo Domingo Zanatepec

Nous allons parfois manger dans des comedors, petits restaurants de quelques tables faisant de la cuisine traditionnelle, la plupart du temps tenus par des femmes. Dans ces restaurants, il y a rarement de menu. On demande ce qu’on peut manger si ce n’est pas écrit sur une ardoise. Au début, Sonia disait qu’elle ne mangeait pas de viande : « no como carne », alors on lui proposait du poulet ! Maintenant, elle précise : « soy vegetariana, no como carne ni pollo » ! Mais là, ce sont les gens qui ne s’y font pas ! Nous voyons bien qu’ils travaillent fort pour essayer de composer un plat « sin carne ni pollo » !

Souvent, les gens nous demandent notre âge. La question est suivi d’une seconde : avez-vous des enfants ? Tout le monde est intrigué par le fait que nous voyagions et surtout que nous n’ayons pas d’enfant avec nous. On répond que nous avons un fils mais qu’il a 25 ans alors il peut se débrouiller sans nous. Et là, une autre question arrive : vous n’avez qu’un seul enfant ??? Oui. Au début, on disait que c’était Paul qui avait un fils et que Sonia n’avait pas d’enfant. Nous avons vite compris que ça ne pouvait pas fonctionner. Déjà que de n’avoir qu’un seul enfant est difficile à comprendre alors si on dit que Sonia n’en a pas, c’est impensable. Là encore, ce sont les gens d’Amérique Centrale qui ont du mal à se faire à notre mode de vie ! Pour eux, les enfants sont très importants et en avoir plusieurs est normal et essentiel. Ce sont ces enfants qui s’occuperont de leurs parents et subviendront à leurs besoins quand ils seront vieux.

Au Mexique et en Amérique Central, les gens vivent ensemble, proches les uns des autres. Pour eux, la proximité n’a rien d’envahissant. Enfin, c’est ce que nous constatons ! Il peut y avoir un grand stationnement, aucune voiture sauf la nôtre. Eh bien, si une voiture arrive, elle viendra se stationner juste à côté de nous. Même chose quand nous sommes sur la plage : les gens s’installent systématiquement les uns à côté des autres. Une fois, un groupe est même venu s’installer dans notre palapa (abri fait de feuilles de palmier) à côté de notre camion. Mais toujours avec de grands sourires et les salutations d’usage. Mais quand même, on ne s’y fait pas !

Partout, il y a beaucoup de chiens. Le plus souvent, ils ont peur de nous et marchent d’un pas mal assuré, la queue entre les pattes. Ils aboient rarement. Par contre, dès que la nuit tombe, ces gentilles bébêtes se transforment en aboyeurs chroniques jusqu’aux premières lueurs du soleil. Au début, on ne s’y faisait pas et il fallait parfois mettre des boulles quies pour dormir. Mais après quelques mois, on s’y fait !

Un autre phénomène nocturne nous a beaucoup surpris. Désolé, mais là, nous allons déboulonner un mythe ancré dans vos vies depuis votre plus tendre enfance : non, les coqs ne chantent pas au levé de soleil ! ILS CHANTENT DU COUCHÉ AU LEVÉ DU SOLEIL !!! Ça veut dire toute la nuit ! Et ils se parlent à plusieurs kilomètres de distance. En résumé, quand les coqs qui sont proches de vous hurlent, plus loin, les autres coqs vont lui répondre. Vous pensez : enfin, ils vont se taire. Eh ! bien non. Quand les coqs au loin ont fini d’hurler, ce sont ceux qui sont à côté de vous qui recommencent. Et ainsi de suite jusqu’à l’aube. Et non, on ne s’y fait pas !

 

Un autre élément important demande une certaine adaptation : la douche froide. Déjà, avoir accès à une douche une fois par jour est un luxe qui nous arrive rarement – confessons ici que nous ne prenons une douche qu’environ une fois par semaine et franchement, ça ne nous manque pas plus que ça ! – mais avoir accès à une douche chaude devient le paradis. Au début du voyage, on payait un camping plus cher juste pour avoir une douche à l’eau chaude mais après un certain temps, on se fait à l’eau froide. Notre record est un mois et demi sans eau chaude. C’est dur pour bien se laver les cheveux mais franchement, on s’y fait !

 

Dès notre entrée au Mexique, une pratique nous a choqué : on ne met pas le papier toilette dans les toilettes mais dans la poubelle. Il n’y a pas de traitement des eaux alors il est impensable de jeter notre petit papier souillé dans le bol de porcelaine. Sincèrement, nous trouvions cela plutôt barbare et dégoutant ! Mais on s’est plié aux règles. Puis, nous sommes arrivés au Belize. Dans ce pays, souvent c’est le contraire : des écriteaux dans les toilettes nous ordonnent de jeter le papier dans les toilettes. Franchement, nous n’y sommes pas arrivés… Nous trouvons trop polluant de jeter du papier qui part on ne sait où. Attention ! Lors de votre prochaine visite chez nous, vous risquez de voir un écriteau dans la salle de bain : prière de jeter votre papier dans la poubelle !

Je sais que plusieurs d’entre vous attendent ce paragraphe depuis longtemps… Le voici enfin : notre vie avec la valise à pipi – ou plutôt la valise à caca. Cette valise magique nous a sauvé la vie à plusieurs occasions : stationné en ville, sur le bord d’une route, sur la plage, dans le désert, la Sopol mobile se transforme en toilettes. On l’installe dans le camion avec son petit sac et hop ! Sans elle, la vie aurait été difficile. Meilleur souvenir : poser la chaise dans le désert, au milieu des cactus. Franchement, on s’y fait et on ne s’en séparerait pour rien au monde ! C’est ce qu’on appelle le confort…

6 thoughts on “On s’habitue à tout, il paraît – version 2 : la vie quotidienne

  1. C’est ce qu’on appelle apprécier la juste valeur des choses… peut-être. Mais pourquoi on s’y fait aux chiens mais pas aux coqs?
    C’est vrai qu’on s’y fait avec le papier de toilette dans la poubelle mais ce sera un défi une fois à la maison. C’est bon de faire cette introspection, suivra dans quelques temps celle de s’y faire entre la sopol et le condo.
    Mais en attendant, il vous reste encore plusieurs semaines d’aventures. Profitez-en bien mes amis. xxxx

  2. J’ ai Le sourire aux lèvres, vous m’apportez un p’tit bout de joie ce matin. Magnifique…c’est toute une aventure!
    Continuez à vous habituer! Le genre humain est surprenant et vous en êtes la preuve vivante.

    Buenas Dias amigos!
    Lamia & JP

  3. C’est bon de vous lire! Trop drôles ces histoires de topes et de trous. Et comment se porte la Sopol? Elle s’y fait?

    1. Elle s’y fait, mais on lui a tout de même ajouté une lame de suspension. Elle en avait bien besoin, la pauvre…

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